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Nîmes

Urgences pauvretés : la fraternité entre dans le coeur des Nîmois

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Juste avant l’arrivée des grands froids, la veille du 17 octobre, Journée internationale pour l’éradication de la pauvreté, le samedi 16 octobre 2021, a clôturé la semaine d’actions de sensibilisation du grand public sur la précarité des plus démunis, en plein centre de Nîmes, place Saint Charles L’opération Urgence Pauvretés. organisée par le réseau Anaïs (Associations nîmoises d’action et d’interventions sociales) qui regroupe trente-cinq associations avec le soutien du Secours Catholique du Gard, a mobilisé plus de cinq cents personnes (selon les organisateurs).

 

Vers une prise de conscience

          « Ȧ Nîmes, 39 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, 36 % n'est pas titulaire du baccalauréat. La pauvreté est  bien présente parmi nous, mais nous n’en n’avons pas toujours bien conscience. C’est la raison pour laquelle, avec le réseau Anaïs nous avons souhaité prendre un temps pour réfléchir à ce problème, à ces problèmes, car il n’y a pas qu’une pauvreté, il y a des pauvretés. Et par le dialogue ouvert à tous, tenter de trouver des solutions. C’est le but de ces débats publics, temps fort d’une semaine chargée en micro-événements, pour faire savoir que certains d’entre nous souffrent de grande précarité et ne mangent pas à leur faim. Parfois même, d’autres ont beaucoup de mal à se loger, à se laver, à se soigner, à se cultiver. Nous avons tenu à le dire, à en parler publiquement afin que les choses changent », déclare Benoît Chermanne, délégué diocésain pour la Solidarité et la famille, membre de l’organisation Urgence Pauvretés.

De la DDASS à la rue

Élina, maintenant comédienne, comique, s'est produite en « One Woman Show ». Mais Élina revient de loin, de très loin. Elle écrit elle-même ses spectacles. Désormais, elle commence à percer. Concernant la pauvreté, Élina sait parfaitement de quoi elle parle : elle a passé 15 ans dans la rue !

« Je m’appelle Élina DUMONT, je suis une enfant de l’abandon », dit-elle avec simplicité pour se présenter. « Ma maman naturelle n’a pas pu s’occuper de moi, elle était un danger pour ses enfants. Elle buvait et passait beaucoup de temps en hôpital psychiatrique. C’est pourquoi j’ai été placée à l’âge de 2 ans par la DDASS dans une famille d’accueil,  dans un trou paumé de la campagne du Perche, au milieu des vaches, des près et des forêts. Là, je peux vous dire qu’on apprend déjà la vie, comme on dit. Famille rustre, mais avec le cœur sur la main. On me disait souvent : ‘On a rien sans rien ! Sans travail tu n’iras pas loin. Ne te fie pas au premier venu et soigne ta présentation’. J’ai bien fait comme me l’avait dit ma mère d’accueil, mais … ça n’a pas suffi. J’ai erré de foyers en squats, chez des connaissances qui sont devenues des amis. J’étais naïve. J’ai fait confiance, accepté toutes les propositions. Mais finalement, tous ont fini par m’abandonner. Alors, je me suis retrouvée dehors, sans limites. J’ai appris à survivre. J’ai appris les règles de la rue, celles que l’on se fabrique pour continuer à avancer. Dehors, il n’y a que trois verbes qui comptent : manger, se réchauffer, dormir. Et, avec un petit coup de pouce du destin, trouver quelqu’un pour avoir un travail , précise Élina. J’étais même addicte au crack, mais j’ai réussi à m’en sortir ! Comme quoi, il faut toujours croire y croire, même quand vous vous trouvez au bout de l’enfer ! ».

          On peut retrouver le témoignage complet et le parcours hallucinant d’Élina Dumont dans son livre, « Longtemps, j’ai habité dehors – De la DDASS à la rue, de la rue à la vie » publié chez Flammarion (2013).

Il est 7 heures, Nîmes s’éveille.

          Alors que Nîmes se réveille à peine, et que certaines personnes sans domicile fixe dorment encore dans la rue, à proximité, les organisateurs s’affairent pour que tout soit prêt à l’heure de l’ouverture prévue vers 9h45, place Saint-Charles. Éric THIMEL, délégué du Secours Catholique du Gard, donne aussi un coup de main pour installer les quatre tentes pour les débats du matin, avant de prendre le micro et lancer l'opération de solidarité. Puis c’est au tour de Mathieu Lané, crieur public, de dire un conte pour installer une ambiance conviviale.

          Très vite, les sans-abris des environs sont invités à prendre une collation pour se réchauffer. Un thé, ou un café et quelques petits gâteaux orientaux sont offerts pour le petit déjeuner. Car la nuit a été froide et la température met encore du temps à remonter. Parmi eux, il y a Franck, qui était assis au bout du boulevard Gambetta. Lui, il arrive à trouver un peu de travail chez les particuliers des environs. Et puis aussi, il y a Tatiana, qui mendie devant la poste  juste à côté de la place Saint-Charles. Elle est Roumaine, et ne parle que très peu le français. Elle a un enfant (mais on ne sait pas où il est), elle est heureuse de boire une boisson chaude, et de manger des petits gâteaux.

Demandez le programme

          Toutes les tables rondes sont en place et les débats peuvent commencer. Ainsi, le matin on a pu assister à quatre débats :

  • Grande Précarité, santé, logement : La rue un choix, une vie ?
  • Éducation et pauvreté : les conséquences de la précarité sur l’éducation, pistes et solutions,
  • Chômage et emploi :  la précarité est-elle un frein au retour à l’emploi ?
  • Femmes et pauvreté : les impacts de la crise sanitaire sur la précarité du travail des femmes ?

          Les débats sont animés et se déroulent dans une ambiance bon-enfant, sans aucune agressivité. Tout le monde a son mot à dire, son expérience à partager. Même certains SDF, comme Patrick, et Fabrice, participent à la discussion. Selon Patrick, « les sans-abris ne sont pas écoutés, il n’y a pas assez de solutions pour leur venir en aide convenablement ». Pour Fabrice, « L’argent de l’État est mal utilisé. On leur propose des hébergements temporaires dans des hôtels, pour un certain coût, alors, qu’il y a d’importantes surfaces libres dans les logements HLM, qui pourraient faire l’affaire, et qui couteraient beaucoup moins cher ».

          Une soupe de légumes géante se réchauffe sur le gaz, proposée par la Table Ouverte, pour ceux qui ont faim à midi. Vendue 1 €, elle est offerte à ceux qui n’ont pas les moyens de se la payer. D’autres stands vendent à bas prix des sandwichs et des boissons. L’après-midi, à partir de 14h, d’autres tables rondes se mettent en place :

  • Accès à la culture : faciliter l’accès des personnes en précarité, pourquoi, comment ?
  • Migrants : présence de Cédric Herrou et Julia Montfort : leurs accès aux droits  ? En tant que citoyen, que puis-je faire ?
  • Justice et pauvreté : une justice de classes ?
  • Média et pauvreté : Le discours des médias sur la pauvreté, quelles conséquences ?
  • Environnement et pauvreté : que nous apprend l’Afrique ?

Les habitants, les passants, les curieux, rejoignent les bénévoles et les militants et participent à un débat puis à un autre, s’enrichissent de l’expérience de ceux qui s’attaquent à ces pauvretés et de ceux qui les vivent au jour le jour.

La chaleur humaine, la richesse des échanges, l’engagement joyeux des uns et des autres ont créé une ambiance fraternelle, l’envie d’avancer ensemble, de se donner des rendez-vous, pour aller plus loin, et d’exprimer le désir de voir émerger un autre mode, une autre société.

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Auteur et crédits
@SCGARD